Lorsqu’un.e hypersensible tombe amoureux.se, c’est pour de bon. Nous nous sentons pousser des ailes, plus compétent.e face au monde extérieur et avec une plus grande vision de nous-même. Tous le monde peut vivre une grande passion amoureuse, mais Elaine Aron, psychologue américaine et enseignante à l’université, elle-même hypersensible, nous explique que les hypersensibles semblent légèrement plus vulnérables à cet égard.
Tout d’abord, qu’est-ce que l’on nomme une personne hypersensible ? Selon Elaine Aron, nous serions environ 20% de la population à être très sensibles, 22% moyennement sensibles et 42% pas ou peu sensibles.
Une personne hypersensible se reconnaitra dans au moins 12 de ces affirmations : être conscient.e des subtiles nuances de l’environnement, être touché.e par l’humeur des autres, être sensible à la douleur, avoir besoin de se retirer dans un endroit calme lors des journées frénétiques, être sensible aux effets de la caféine, être sensible aux lumières violentes, odeurs fortes, tissus grossiers ou sirènes proches, avoir une vie intérieure riche et complexe, être dérangé.e par le bruit, avoir des émotions profondes suscitées par les arts et la musique, être une personne consciencieuse, sursauter facilement, être énervé.e lorsqu’il y a beaucoup à faire en peu de temps, sentir lorsqu’une autre personne est mal à l’aise dans son environnement matériel et savoir quoi faire pour la soulager (changer l’éclairage, fermer la fenêtre, proposer un autre siège,…), perdre les pédales lorsqu’il y a trop de choses à faire, essayer d’éviter de commettre des erreurs ou des oublis, éviter les films et émissions qui contiennent des scènes de violence, être énervé.e lorsque beaucoup de choses se passent autour de soi, être dérangé.e par la faim qui provoque une forte réaction et perturbe la concentration et l’humeur, être ébranlé.e par les changements de vie, remarquer et apprécier les parfums et goûts délicats, bruits doux, subtiles œuvres d’art, faire son possible pour éviter les situations inquiétantes ou perturbatrices, perdre son sang-froid quand on est observé.e en travaillant ou quand on doit rivaliser avec d’autres, avoir été considéré.e comme sensible ou timide dans son enfance par les parents ou enseignants.
Les hypersensibles se sentent parfois profondément incompris puisque nous évoluons dans une société où la majorité des individus ne le sont pas. Il s’agit dès lors de tout d’abord légitimer notre fonctionnement, notre différence, puis une fois acceptée, l’expliquer aux autres ou repérer celles et ceux qui fonctionnent comme nous pour partager notre vécu en toute simplicité.
Être bousculé.e à l’excès dans une société hyper stimulante n’est pas évident et nous demande de mettre des balises dans notre vie quotidienne pour y survivre du mieux possible : prévoir beaucoup plus de temps de repos, de solitude, alléger son agenda social, mettre ses limites claires sans culpabiliser ni entraîner les autres à fonctionner à notre mode, se respecter dans ses besoins et accepter qu’ils soient un peu différents de la majorité des gens, apprendre à faire la part des choses entre ce que nous sentons et qui nous appartient et ce que nous sentons et qui ne nous appartient pas, apprendre à faire des demandes claires pour diminuer l’intensité de ce qui nous semble nous agresser (fermer une fenêtre, faire moins de bruit, diminuer la lumière,…),…
Au sein d’une relation amoureuse, être hypersensible peut être dévorant, envahissant, voir incompréhensible pour le/la partenaire s’il/elle ne l’est pas et ne nous comprend pas. Cela peut nous entraîner à ne pas nous respecter à 100% si nous sentons les émotions et besoins de notre partenaire et que nous nous sentons obligé.e d’y répondre, même sans vérifier auprès de nous-même, auprès de lui/elle si c’est ok pour chacun. La communication sera importante (voir le post : Les outils de communication indispensables à la survie d’un couple (en confinement)) et l’évaluation de notre part de responsabilité ou non dans le bonheur de l’autre sera un défi : comment sentir les choses sans que cela ne prenne toute la place ? Sans que je me sente responsable à la place de l’autre ? Sans m‘oublier ?
De plus, il ne s’agit pas que de tomber en amour, mais aussi qu’il y ait réciprocité ! L’intensité peut être plus forte justement d’autant plus qu’il n’y a pas de réciprocité. Nous cristallisons une image positive de l’être aimé qui s’estompe avec la réalité du quotidien, la connaissance de l’autre, la vue de ses qualités et de ses défauts. Un.e hypersensible qui reste dans l’idéalisation et la passion dévorante provoquera la rupture si l’autre se sent étouffer sous cette passion non réaliste où il/elle ne se sent pas vu.e pour qui il/elle est réellement.
Comment comprendre ce qui se joue-là ? Carl Jung a observé que les introvertis, soit probablement la plupart des personnes hypersensibles, ont leur énergie tournée vers l’intérieur d’eux-même. Ils protègent ainsi leur vie secrète intérieure, afin de l’empêcher d’être asphyxiée par le monde extérieur. Pour lui, plus notre introversion est forte, plus elle pèse sur notre inconscient. Cette accumulation d’énergie dans l’inconscient pousse pour sortir, et elle va dès lors s’échapper en force et se diriger vers une personne, un endroit, un objet,… qui aura une importance démesurée pour la personne introvertie. L’amour envers un.e partenaire sera puissant, mais aura malheureusement moins à voir avec lui/elle qu’avec le temps depuis lequel notre énergie a été refoulée… (lire le post : Comprendre et se libérer de la dépendance affective).
De plus, parfois l’amour intense, passionnel et sensuel est une projection de nos désirs et besoins spirituels sur un autre être humain. Les déceptions sont alors au rendez-vous lorsque nous nous rendons compte que notre partenaire… n’est qu’humain.e ! Carl Jung nomme notre besoin d’amour divin « compagnon de voyage ». Ce dernier a pour tâche de nous entraîner dans nos profondeurs, tel un guide spirituel. Mais il arrive parfois que nous projetions cette image sur une personne en chair et en os, désirant vivre le paradis sur terre. Malheureusement notre partenaire ne pourra jamais nous faire voyager dans les profondeurs de notre être comme ce « compagnon de voyage » nous invite à le faire.
« A moins que nous n’offrions notre amour à quelque chose qui, en fin de compte,
se révélera faux, le vrai, lui, ne pourra jamais entrer »
Charles Williams
A cela s’ajoute la notion d’attachement. En effet, nous avons toutes et tous lors de notre enfance, une ou plusieurs personnes qui nous ont permises de créer un lien d’attachement sécurisant ou insécurisant, selon la réponse que nous recevions à nos besoins de base (réponses positives et régulières, neutres, négatives, absentes, irrégulières,…). L’étude de Hazan et Shaver en 1987 montre que 50 à 60% de la population a pu construire un lien sécurisant dans son enfance. C’est-à-dire que nous sommes 40 à 50% de la population à arriver à l’âge adulte avec un attachement… insécurisant qui se traduit par une grande méfiance envers les relations intimes (la fuite) ou à l’inverse, une grande intensité dans les relations amicales et amoureuses (anxiété-ambivalence). Pour avancer dans une relation mature, il est dès lors indispensable de pouvoir apprendre à faire la part des choses et voir ce que nous recherchons encore chez le/la partenaire qui date de nos besoins d’enfant (voir le post : En quoi certaines blessures d’enfance influencent nos relations amoureuses ?). Nous ne pouvons pas tout exiger d’un adulte : à nous de faire le nettoyage par le biais d’une thérapie par exemple...
Pour nous protéger d’une passion dévorante immature, Elaine Aron conseille aux hypersensibles introvertis d’entretenir des contacts avec le monde extérieur en refusant de s'isoler, afin de trouver un équilibre permettant de vivre également de belles relations d’intimité hors de notre (future) relation de couple.
Enfin, les hypersensibles ont tendance à se dévaloriser car nous ne correspondons pas à l’idéal proposé dans notre société. Il a été démontré qu’une personne qui éprouve plus de doutes sur sa valeur personnelle tombe plus facilement amoureuse, car elle s’estime « chanceuse » d’avoir trouvé une personne « qui veuille bien d’elle ». Le réveil peut être brutal quelques années plus tard, de s’être mis.e en couple avec une personne qui ne nous correspond pas du tout !
Par conséquent, augmenter notre amour-propre, recadrer nos souvenirs par l’éclairage de notre hypersensibilité, apprendre à vivre seul.e et apprendre à affronter régulièrement le monde en connaissance de notre valeur et de nos moyens nous permettra de faire un choix amoureux plus adéquat pour nous.
Pour aller plus loin :
- Elaine N. Aron « Hypersensibles : mieux se comprendre pour mieux s’accepter », Les Éditions de l’Homme, 2013
- Groupe de parole mixte pour adultes présentant un haut potentiel et de l'hypersensibilité ;
- Consultations de love coaching à distance ou en présentiel à Bruxelles ;
- Événements de Slow Dating à Bruxelles.
Cet article t'a parlé ? Il a répondu à un questionnement important pour toi ? Pense à le diffuser, partager, liker ou commenter pour en faire bénéficier le plus grand nombre ! Merci !
Comentários