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Photo du rédacteurLaurie Degryse - Love coach

Les 2 sujets de discussion tabous au sein des couples

Selon Esther Perel, ethno-psychologue, thérapeute de couple et de la famille, nous entrons dans le mariage avec un pré-supposé qui n’est jamais discuté : la monogamie exclusive et consensuelle. En effet, nous prenons pour acquis cet état de fait, bien ancré dans notre culture occidentale d'influence catholique. Or, nous arrivons à une époque où le mariage et ses limites sont remis en question. Avec le taux de divorce élevé que nous connaissons, la rupture pour trahison du contrat de base non-discuté de monogamie fait des ravages. De plus, nous assistons à la prolifération de différents types de relations amoureuses de plus en plus visibles et assumées : polyamours, bisexualité, relations libres, communautés, ménage à trois,…


Esther Perel remet en cause notre vision du mariage et de l’infidélité qui s’est modifiée au cours du temps, mais qui paradoxalement n’est jamais discutée au sein des couples. Effectivement, à l’ère où les couples se marient par amour et non plus par contrat financier, c’est l’estime de soi qui est touché profondément par une trahison du partenaire, remettant en cause notre droit à être aimé.e. Les bases du couple sont moins solides qu’au temps des mariages arrangés où la compatibilité reproductive, le sentiment de sécurité et d’appartenance sociale suffisaient amplement à la stabilité d’un couple.

Aujourd’hui, avec les mariages d’amour, la faute est très souvent mise uniquement sur la personne qui a eu l’aventure extra-conjugale, rejetant le principe du couple vu comme un système interdépendant, et faisant fi de l’idéalisation de l’institution du mariage ou du couple (voir le post Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants). Or il y a nécessité de partager cette responsabilité pour pouvoir transcender cette expérience conjugale.


Désidéaliser le couple, le partenaire et le mariage, explorer ses propres blessures d’enfance permet aussi d’identifier les espaces qui sont sensibles en nous, guérir de ses manques et augmenter sa confiance en soi (voir l’article En quoi certaines blessures d’enfance influencent nos relations amoureuses?). Éviter de le prendre personnellement peut être une étape importante de la guérison, car ce que notre partenaire vit lui appartient et n’est pas pour autant dirigé « contre » l’engagement pris envers nous. En effet, une aventure permet parfois à la personne infidèle de (re)découvrir une part d’elle-même qui était endormie, oubliée ou méconnue, lui donnant un accès plus complet à qui elle est.

Mais d’observer que ces discussions restent taboues, curieusement. Les débats sur la notion d’infidélité ne sont présents que pour nous moraliser et nous condamner. L’état de fait montre cependant que l’infidélité est encore bien présente dans notre culture, alors pourquoi ce vide de transparence et de dialogue sur cette question ?

« Est-ce qu’on ne s’épargnerait pas beaucoup de souffrances et de déceptions si on en finissait avec la tyrannie de la monogamie ? » (p. 357)

Ne nous leurrons pas, l’infidélité existe depuis l’invention du mariage et perdure, malgré les tabous, les freins mis en place, les dénonciations, les châtiments et diabolisations que nous en faisons. La norme officielle est la monogamie mais la norme officieuse reste l’infidélité. Il est donc paradoxale que ce comportement, à la fois interdit partout et pratiqué par tous, soit si peu mis sur la table de discussion au sein des couples. De plus, cette norme est vécue différemment selon les cultures, les époques et les interprétations qu’on lui donne, ainsi que la souffrance et la manière d’en parler dépendent fortement de l’environnement dans lequel nous avons été baignés.

Loin de mettre l’ensemble de la responsabilité sur le couple « qui va mal », le partenaire « infidèle » ou les individus considérés comme « déficients » par rapport au mariage, Esther Perel note que l’infidélité en dit long sur l'inadaptation de l’institution du mariage, en elle-même, de manière générale, et non sur les individus concernés. C’est une vrai question de normes sociales et de cadres (mal) ajustés aux vécus de la majorité.

En effet, il peut être utile et intéressant de repenser les notions de fidélité sexuelle, fidélité émotionnelle, infidélité, trahison, contrat monogame exclusif,… pour que la relation amoureuse puisse survivre aux aléas de la vie de couple, tout en correspondant aux besoins actuels de chacun. Le dialogue au sein du couple - avant que cela n’arrive - est une bonne solution pour nommer les besoins et les limites des deux partenaires. Ces derniers sont probablement différents, ce qui est logique en soi puisque chacun de nous est unique, pouvant donner lieu, pourquoi pas, à un contrat asymétrique, mais seulement s’il ne s’y cache aucun rapport de force. Ce contrat de non-monogamie consensuelle nécessite d’être réévalué régulièrement pour s’adapter au cours du temps, aux évolutions des attentes, besoins, limites de chacun et de la vie commune.

« Nous pouvons être attachés à plusieurs amis ou à plusieurs enfants à la fois. Pourquoi pas plusieurs partenaires ? » (p. 358)

Cependant, cela n’empêche pas pour autant le sentiment de trahison. En effet, même dans une relation libre, quand la transgression des règles est le moteur principal de l’infidélité, elle peut avoir lieu. L’éthique de la non-monogamie a comme base première la transparence et la confiance et ce, via une communication ouverte et honnête. Le sentiment de tromperie peut donc aussi apparaître chez les couples libres si l’un des partenaires ne se sent pas respecté dans ces règles pré-établies : mensonges, tricheries, ne pas tout dévoiler,…

Ensuite, trois schémas sont observables au sein des couples qui font le choix de rester ensemble après une infidélité : les martyrs, les bâtisseurs et les explorateurs. Premièrement, pour les couples martyrs, l’infidélité est et restera un événement traumatisant dans la relation, amenant beaucoup d’amertume, de vengeance et d’apitoiement sur soi. Les partenaires ressassent, critiquent et s’accusent mutuellement de leurs souffrances, même plusieurs années après les faits. Pour eux, le mariage est une prison d'où ils ne savent pas s’en aller et dans laquelle ils sont incapables d’évoluer.

Deuxièmement, les constructeurs restent ensemble par attachement à leur engagement et à la vie qu’ils ont bâtie. Ils souhaitent préserver l’harmonie familiale et les liens sociaux qu’ils ont : les choses sont comme avant, sans avoir vraiment évoluées. Ils sont capables de tourner la page de l’infidélité mais pas de la transcender. Les constructeurs se concentrent sur les points forts de leur relation, sans aller explorer ni nettoyer les points faibles.

Enfin, pour les explorateurs, l’infidélité devient source de transformation. Ils sont capables de voir dans cette expérience, même si elle est douloureuse, une possibilité de changement positif : nouvelle étincelle d’amour et de désir sexuel, s’accorder mutuellement toute leur attention, intensité, intimité nouvelle et profonde,… Ces couples ont une grande capacité à exprimer et accepter leurs sentiments, une grande tolérance vis-à-vis de l’incertitude et de l’ambiguïté permettant de prendre le temps d’explorer leurs vécus et de renouer des liens plus profonds. Ils distinguent ce qui « fait mal » de ce qui « est mal », à l’inverse des martyrs plus enclins à s’appuyer sur des convictions morales.

En conclusion, le couple et le mariage reposent sur un choix d’engagement entre deux adultes consentants, à renouveler au jour le jour. Et nous gagnerions en souffrances inutiles à éclaircir le thème de la fidélité/l’infidélité pour que chacun puisse entrer dans la relation en pleine connaissance des limites définies ensemble. La monogamie est un idéal de société difficilement atteignable par la majorité d’entre-nous, dès lors n’est-il pas trompeur de se le faire croire encore aujourd’hui ?


Par ailleurs, une aventure extra-conjugale peut être vue comme le déclencheur d’une réelle transformation relationnelle, en prenant le temps de l’explorer, sans aller trop vite dans la rupture ou dans le retour vers la routine. Enfin, nous avons tous nos bagages transgénérationnels (voir le post sur L’influence des mémoires intra-utérines sur nos choix amoureux) et nos blessures d’enfance qui font que certaines limites ou trahisons nous impactent plus ou moins fortement. En cela, c’est à nous-même d’aller guérir ce qui nous appartient…


Pour aller plus loin :

- Perel Esther, « Je t’aime, je te trompe : Repenser l’infidélité pour réinventer son couple » Editions Robert Laffont, 2018 ;

- Consultations de love coaching en présentiel à Bruxelles ou à distance ;

- Constellation familiale en individuelle ou en groupe sur les relations amoureuses, les schémas répétitifs, les relations toxiques,... ;


- Ateliers sur les relations amoureuses ;


- Regarder cette vidéo humoristique basée sur le même ouvrage :



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