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Photo du rédacteurLaurie Degryse - Love coach

Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants...

Un grand nombre de personnes entrent dans le mariage avec des attentes romantiques et idéalisées. En effet, une première étape pour le couple désirant s’engager est un ajustement entre le désir d’être ensemble et l’autonomie de chacun. Le second défi est alors le désenchantement de la vie de couple selon l’idéalisation plus ou moins forte du partenaire et de la relation conjugale.



En effet, l’amour romantique véhiculée dans nos sociétés occidentales, et ce, notamment via l’industrie médiatique, influence les comportements des personnes amoureuses qui imaginent leur mariage avec comme références ces principes. Ces normes sont projetées sur le partenaire, déformant ainsi l’être aimé dans une direction positive. Cela ne serait pas dérangeant si ces fantasmes ne se transformaient pas en attentes par rapport au partenaire et à l’avenir de leur relation. Ces attentes peuvent être irréalistes, terme pris ici dans le sens où une personne aimée est mise sur un piédestal lors d’un coup de foudre qui engendre une idéalisation de l’être aimé.



« L’extravagance de notre époque tient dans ce rêve déraisonnable : le tout-en-un.

Un seul être doit condenser la totalité de mes aspirations.

Qui peut répondre à une telle attente ? »

Pascal Bruckner, philosophe



Car au contact de la vie quotidienne, l’idéalisme s’efface pour le désenchantement. Une nouvelle perception du conjoint se développe ainsi qu’une conscience que les attentes ne se réaliseront sans doute pas. La frustration qui peut émerger de cette nouveauté peut mener vers un comportement de fuite, pouvant se traduire par une rupture. Le défi de ces couples désabusés est donc de faire le deuil de leurs fantasmes et rendre leurs attentes plus réalistes, et ce, envers leur partenaire, leur vie de couple au quotidien ainsi qu’envers eux-mêmes.


L’insatisfaction est un indicateur du mal-être envers le couple, et les attentes irréalistes pourraient être une des composantes de cette insatisfaction. En effet, une des raisons de divorce est l’insatisfaction conjugale. En outre, les attentes irréalistes sont seulement une des composantes de l’insatisfaction. Car au sein d’un couple, la satisfaction des membres est déterminée par le niveau de comparaison par rapport à une éventuelle autre relation. Nous sommes satisfaits et heureux lorsque les résultats perçus sont au-dessus du niveau de comparaison, et inversement. Si des possibilités extérieures sont présentées comme étant plus attrayantes et disponibles, la relation en cours devient dès lors moins satisfaisante et, par conséquent, moins stable. L’individu choisira de rester dans la relation si les avantages de cette dernière sont perçus comme étant au-dessus de l’alternative, et inversement.


Le principal problème est que la plupart des couples passent sous silence et prennent pour dit le partage d’une vision commune de la réalité, notamment en ce qui concerne l’amour, la solidarité, le désintérêt, et les échanges interpersonnels. Ces attentes sont différentes entre hommes et femmes, mais définies de manière historique, si pas biologique. Selon les différentes études sur le sujet, les femmes attendent de l’affection, de l’intimité, de la communication, alors que les hommes demandent de la sexualité ainsi qu’une prise en charge du ménage.


Par ailleurs, c'est une fausse idée de prétendre que le divorce est une histoire récente. En effet, les Romains connaissent le mariage et le divorce : pour eux, le mariage est un pacte à renouveler au jour le jour. Quand l’affection n’est plus présente, le mariage ne l’est, par conséquent, plus non plus. C’est le christianisme qui décide plus tard d’en faire un sacrement, ce qui lui donne ce caractère indissoluble. Beaucoup plus tard, les jeunes issus du baby-boom décident de rejeter l’hypocrisie de l’adultère bourgeois : la vérité du sentiment prime et, s’il y a tricherie, c’est la rupture.

Pour les couples de nos arrières grands-parents, principalement dissous par le décès de l’un des deux partenaires, seul :


- 50% des mariages se prédisaient plus de 15 ans de vie commune ;

- Moins de 33% se prédisaient plus de 25 ans ;

- La durée moyenne des mariages se situait entre 12 et 17 ans.


Ces chiffres portent à réfléchir...


Ensuite, le philosophe contemporain Luc Ferry, de rappeler que le passage à la famille moderne fait que, l’ancien mariage de raison basé sur l’économie et la transmission du patrimoine est remplacé, depuis quelque temps déjà, par les mariages d’amour. Selon lui, ce nouveau mode d’union est fragile et variable, car aujourd’hui, 60 % d’entre eux se terminent par un divorce, et ce, demandé à 70 % par les femmes (chose impensable à l’époque).


Le mariage de toute une vie n’est ni plus ni moins qu’un idéal. Ses racines sont vieilles, mais son usage est moderne. Cet idéal n’a acquis l’accord général de la société que ce dernier siècle. De plus, selon lui, la cohabitation avant mariage découle du fait que le choix du partenaire devient complexe, dès que la question des biens familiaux et du prestige n’entre plus en compte. Mais ce n’est pas pour autant que le mariage n’est plus l’idéal commun. L’augmentation des divorces trouve sa signification dans le fait que les individus sont beaucoup plus exigeants par rapport au mariage, même s’ils ne savent pas vraiment ce qu’ils désirent.


Cet idéal fusionnel de l’amour-passion nous fait chercher quelqu’un qui nous correspond totalement : qui ne nous contrarie pas, qui nous connaît parfaitement et qui nous stimule pour nous permettre de nous épanouir pleinement. « Libre ensemble », nous dit le sociologue François de Singly en parlant du mariage aujourd’hui.


De plus, la société entretient un mythe : celui de la paix au foyer. Or, tout couple passe par des crises. Mais ces crises, pourtant nécessaires à la relation, vont à l’encontre de l’idéal du couple en bonne santé. En effet, les feuilletons et films projetés au cinéma ou sur notre écran sont, comme les romans, les miroirs des normes en cours dans une société donnée, à un moment donné. Les débats présents dans ces feuilletons américains nous montrent ce qui préoccupe nos contemporains : les relations d’amour, les contradictions, les tensions, la sexualité indépendante, l’importance de la famille, l’honnêteté des amitiés ou bien, au contraire, la tromperie pour éviter l’ennui, les séparations douloureuses ou encore l’engagement par un mariage sublimé. Chacun de nous possède une image du mariage, entretenue et enrichie par le cinéma.


Cette industrie cinématographique nous montre les bonheurs et malheurs des gens mariés, paradoxe dans un monde où les probabilités de divorces augmentent. Mais il est vrai que « un bon casting est toujours un mariage heureux quel que soit le scénario » observe Breuil, en parlant de notre époque contemporaine. L’idéal décrit dans ces films est un amour fusion, où l’on est prêt à donner sa vie pour l’autre, comme un amour d’enfant. De plus, la fin du scénario ne nous informe jamais sur les étapes et les crises du couple, car il se clôture trop souvent avec le fameux « ils se marièrent (et eurent beaucoup d'enfants) », ne laissant aucune vision du leur quotidien.


Le fait de regarder les programmes de type romantique est clairement associé à des attentes idéalistes. De plus, les personnes plus jeunes possèdent des attentes plus idéalistes envers le mariage. Mais il n’est pas (encore) possible de connaître la direction de cette causalité : si ces personnes sont romantiques, est-ce parce qu’ils visionnent plutôt ce type de programme, ou bien ils le deviennent à la suite de ces programmes romantiques?


Pour finir, l’influence de l’expérience familiale est aussi à explorer, disant que les parents ne montrent que le positif de leur relation, puisque c’est socialement désirable de célébrer l’amour. Cela entretient également des attentes irréalistes, voir des croyances limitantes concernant le couple et l'amour. Cela peut être explorer lors de séances de constellations familiales par exemple, permettant de s'en libérer.


En conclusion, bien se connaître, savoir quelles sont ses propres attentes et vérifier si elles ne sont pas irréalistes permet, à travers le dialogue, d’éviter les nombreuses frustrations dans un couple. Revenir à l’instant présent, ne pas se comparer, s’autoriser à être pleinement soit-même et accepter de voir l’autre tel qu’il est et non tel qu’on souhaiterait qu’il soit augmente la satisfaction et les bonheurs simples dans un couple. Enfin, choisir de renouveler son engagement chaque jour et s’accompagner l’un l’autre pour évoluer ensemble.




Pour aller plus loin :


- Laurie Degryse "Les attentes irréalistes envers le mariage : un risque de divorce ?", Université Catholique de Louvain, 2012 (pdf résumé gratuit sur simple demande à info@etincelledamour.be ) ;


- Ateliers sur les relations amoureuses ;


- Consultations de love coaching à distance ou en présentiel à Bruxelles.



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